Un baume sur l'été - Retour sur Sainte-Marie-la-Mauderne
Updated: Jul 3, 2022

L'été commence merveilleusement bien avec la variété et la qualité de l'offre culturelle qui se déploie dans les Laurentides, et le Théâtre Gilles-Vigneault n'en fait pas exception. Sa production estivale, Sainte-Marie-la-Mauderne, est lancée depuis le 23 juin dernier, et elle s'avère, pour moi, être un véritable baume au cœur.
Crédit photo: Justine Champagne
Cette adaptation au théâtre du scénario de Ken Scott de La Grande séduction est un véritable plaisir pour les yeux et l'âme. On y voit là, très certainement, tout l'amour que porte Emmanuel Reichenbach pour l'œuvre qu'il adapte pour la scène du Théâtre Gilles-Vigneault, en coproduction avec le groupe Encore Spectacle.
Je dois le dire d'emblée, j'ai l'habitude de voir des œuvres qui me sortent de ma zone de confort, qui me font réfléchir et qui me restent collées à la peau pendant des semaines. J'aime être surprise, choquée, inconfortable...C'est ce qui m'intéresse le plus, j'aime aller à la rencontre de ce qui est différent de moi, de ce qui me confronte dans mes valeurs et qui défait mes idées préconçues. Le Théâtre Gilles-Vigneault est en ce sens un de mes diffuseurs préférés de la région, puisqu'il offre toujours une programmation diversifiée, ouverte et inclusive, tournée vers la richesse des différences de création et engagée dans une démarche de découverte de l'autre. J'étais donc très curieuse à l'idée de voir leur production estivale, qui me semblait miser davantage sur une création familière, accessible.
J'ai été absolument charmée. Je me suis laissée emporter dès les premiers instants partagés avec les personnages, par le jeu des comédiens qui leur donnent vie avec un amour bien senti. "Ces gens ont du plaisir", me suis-je mise à penser, et on avait besoin de ce vent de fraîcheur, de cette brise insulaire. Sans l'adresse des interprètes, on n'y croirait pas, tout simplement. Mais leur bonheur est si grand qu'il en déborde de partout, et on en redemande.
Le spectacle est bien rythmé, et heureusement, car la représentation est assez longue: une première partie d'une heure trente, une entracte de vingt minutes, puis une deuxième partie d'une autre trentaine de minutes. L'adaptation de Reichenbach inclut quelques rappels de l'actualité des dernières années qui viennent ajouter plusieurs moments cocasses à la pièce.
Reste que le cœur de l'histoire est toujours aussi criant d'actualité, et ce, près de 20 ans après la parution du film. Les habitants de l'île, chômeurs de force, doivent faire des pieds et des mains pour que le projet d'usine, qui promet de leur offrir de l'emploi, s'installe dans leur village de Sainte-Marie-la-Mauderne. Pour ce faire, ils doivent notamment avoir un médecin en permanence sur l'île. Fayolle Jean Jr interprète Christopher Lewis, le jeune docteur que les habitants essaieront de charmer à coup de cricket et de jazz expérimental - je n'en dis pas plus! On est vraiment dans une pièce où les situations comiques et les quiproquos se suivent, bien que les personnages, eux, vivent une situation plus dramatique, un chèque du gouvernement à la fois, et un départ de voisin, souvent un ami précieux, au détour de chaque mauvaise nouvelle.
Je n'arrive pas à dire si un personnage m'a plu davantage qu'un autre, tellement chaque comédienne et comédien en a incarné la présence avec justesse. Le metteur en scène, Frédéric Blanchette, qui a fait un travail exemplaire pour la pièce, était lui aussi sur les planches, en remplacement de Simon Beaulé-Bulman. Ce fut un ensemble harmonieux, tissé serré et au jeu bien senti qui s'est donné avec beaucoup de coeur jeudi dernier.
Ce fut somme toute une expérience fort agréable pour moi de voir cette production estivale du Théâtre Gilles-Vigneault. Après deux ans à vivre le stress lié à la pandémie, à la guerre en Ukraine, aux changements climatiques, en ne nommant que ceux-là, Sainte-Marie-la-Mauderne fait du bien. J'ai été confrontée différemment cette fois-ci. J'ai accepté de ne pas me questionner, de me laisser aller, de vivre, le temps d'une soirée, un moment un peu plus léger. Pas que la pièce n'ait pas de pertinence, au contraire. Son propos en appelle, au détour des stratagèmes, à la force d'une communauté puisée dans sa résilience, sa créativité, et, surtout, sa bienveillance. Un bel été qui s'amorce au Théâtre Gilles-Vigneault!
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